
Vous qui passez sans nous voir propose les portraits brefs des passagers d’un bus. Au gré des trajets, nous croisons des personnages touchants par ce qu’ils exposent de leurs failles, de leurs dérives existentielles, mais aussi de leurs espoirs, de leurs rêves, de leurs attachements… Une fois ce livre refermé vous ne pourrez plus passer sans les voir !
VOUS QUI PASSEZ SANS NOUS VOIR
9782490313280
« Quand je prends le bus, je regarde les gens. Je me demande qui ils sont, ce qu’ils font, où ils vont. Parfois, j’imagine leur histoire. D’autres fois, je me demande si ma propre histoire se lit et se devine en me dévisageant, en examinant mes attitudes mes vêtements… » L’apparence la plus quelconque peut dissimuler une existence extraordinaire, l’instantané du quotidien l’emporte sur le bonheur ou le malheur de la vie. C’est le cas pour nous tous. C’est le cas dans ce bus et à l’extérieur également.
Ce roman propose les portraits brefs des passagers d’un bus. Au gré des trajets, nous croisons des personnages touchants par ce qu’ils exposent de leurs failles, de leurs dérives existentielles, mais aussi de leurs espoirs, de leurs rêves, de leurs attachements… Ce livre refermé, nous ne pourrons plus passer sans les voir !
Enfant pleine d’imagination, Lola Caño a grandi dans un petit village de l’Ain, au sein d’une famille ouvrière. Elle vit aujourd’hui à Lyon et a choisi de dédier son écriture aux « oubliés », « ceux qui, pour avancer, luttent chaque jour, contre les autres ou contre eux-mêmes, ceux que l’on ne remarque pas ». Dans un style vif qui passe aisément de la légèreté à la gravité, de la poésie à la description, ce texte est l’illustration de son combat contre les préjugés : sincère et audacieux !
Êtes-vous curieux ? Aimeriez-vous tout savoir de votre voisin en un seul regard ? Au gré de trajets en bus, découvrez les histoires de personnages touchants, à différentes étapes de leur cheminement et des épreuves qu’ils traversent. Certains montent plusieurs fois dans le bus, d’autres une seule, nous laissant avec des questions. Ces portraits sont un hommage à des personnes que j’ai rencontrées et à qui j’ai trouvé beaucoup de courage d’avoir su traverser ces épreuves sans montrer leurs difficultés.
André. 75 ans cheveux bruns, grisonnants. Yeux bleu gris. Assis derrière le chauffeur. Lui-même ancien chauffeur de bus à la retraite. Bavard, tendance à en rajouter pour enjoliver les histoires, enseigner une morale. Brouillé avec ses enfants, il regrette de ne pas voir son petit-fils plus souvent pour lui transmettre ses fables.
David. Pas de place précise. Il prend le bus plusieurs fois. 40 ans, cheveux blonds, yeux bleus délavés, teint clair, ongles rongés anxieux. Divorcé, en burn-out au travail. Mal dans sa peau, obésité dans son enfance et rejeté par sa famille.
Flora. D’origine ivoirienne. Femme plantureuse, coupe afro. Douce. Catholique. : médaillon à l’effigie de la vierge Marie autour du cou. Elle le serre souvent dans sa main pour prier.
Celle qui rêve. Peau grise cheveux fins châtains ternes, cernes. Parfois s’endort dans le bus. Épuisée par des cauchemars récurrents.
Benjamin. 28 ans cheveux noirs bouclés, séducteur. Bijoutier et photographe. Sens du détail, du précis, du beau. Porte une grosse chevalière dorée sur des doigts fins et délicats. Un appareil photo autour du cou.
Lise. 40 ans. Boxeuse, a souvent un sac de sport sur les genoux. Silhouette athlétique, jambes longues, yeux très noirs, cheveux blonds. Romantique. Elle retrouve un amour de jeunesse au moment où son couple est en difficulté. Elle mène une double vie et va devoir faire un choix.
Hélène. 88 ans, petite, cheveux gris courts, yeux bruns. Exilée à la suite de la guerre d’Algérie. Veuve, atteinte d’Alzheimer. Accompagnée par sa petite fille à l’hôpital pour sa consultation mémoire.
Antonella. 50 ans, Italienne souriante, chaleureuse. Bavarde avec de grands gestes. Yeux pétillants. On voit beaucoup ses mains.
Roxanne. 35 ans, cheveux auburn, taches de rousseur, yeux brillants. Au fil de l’histoire, elle sera en traitement pour un cancer. Elle a parfois un foulard imprimé ethnique et de grandes créoles, parfois un fin duvet de cheveux sur la tête.
Dans un monde où nous avons les yeux rivés sur nos écrans, pouvons-nous encore nous rencontrer, faire attention les uns aux autres et créer de véritables liens ? Malgré tous les outils et les progrès pour dénoncer des situations de violence ou d’injustice, comment réagissons-nous concrètement lorsque nous y sommes confrontés ?
HÉLÈNE – I
Elle a vécu la guerre, l’exil. Elle a perdu des frères, des sœurs, ses parents, des enfants. Elle a sauvé un fils, en a perdu un autre, elle a eu une fille et, finalement, cinq petits-enfants, dont je fais partie. Je la regarde, assise à mes côtés, dans le bus. Elle est notre foyer. Malgré toute l’horreur qu’ils ont vue, ses yeux sont rieurs, voire taquins. Comme chaque mois, je l’accompagne pour sa consultation mémoire. Je pense à ses souvenirs qui s’effacent et les miens reviennent.
Elle se retenait de rire à nos bêtises et s’obligeait à garder un air sévère en nous faisant la leçon. Elle riait de toutes les petites choses de la vie. Si un pet lui échappait, elle s’exclamait : « Il y a de l’orage » et elle pouffait pendant plusieurs minutes. Ça marchait chaque fois. Elle laissait traîner ses sous-vêtements sur les chaises de la cuisine.
Mon grand-père, lui, était discret, patient, sérieux, ordonné et pudique. Je me souviens de mon grand-père passant sa tête par la porte de la salle de bain pour demander son pantalon qu’il avait oublié. En lui apportant, elle gloussait : « Tu te caches ? Tu crois que je ne t’ai jamais vu ? » Il levait les yeux au ciel comme à chaque fois qu’il se retenait de rire. Il l’adorait.
Il avait un cancer avancé. Des polypes aux sinus. La chirurgie s’annonçait lourde. Il faudrait curer la moitié du visage de l’intérieur et retirer un œil. Il était coquet et bel homme. Devant le chirurgien, il hésitait, cherchait le regard de sa femme, son avis. « Entre un œil et la vie…, ça t’ira mieux qu’à ce con de Le Pen ». Ils avaient décidé. Il gagnerait du temps, mais ça ne suffirait pas. Cette pourriture continuerait de le ronger de l’intérieur. Il était déjà sourd, il perdrait l’odorat, le goût, la vue. Elle resterait à son chevet jour et nuit. Comme de nombreuses fois dans sa vie, elle soignerait, panserait, rassurerait, continuerait d’espérer.
Quand il mourut, ce fut à l’hôpital. Les médecins avaient insisté pour qu’Hélène rentre se reposer. Elle n’était pas là. Elle l’observait, reconnaissait les signes de souffrance, il s’était mordu les lèvres de douleur, jusqu’au sang. Il refusait les antidouleurs pour se sentir vivant.
À ce moment-là aussi je la regardais. J’invoquais tout ce que mes grands-parents avaient partagé, ce que l’on savait et leurs secrets. J’imaginais le vide que sa mort laissait en elle.
Dix ans après, dans le bus, elle continue d’avancer. Sa mémoire fout le camp, mais elle donne le change. J’aimerais faire pour elle ne serait-ce que la moitié de ce qu’elle a fait pour moi, lui dire merci.
Quel est le point de départ narratif de votre roman, et pourquoi ?
Lors d’un voyage, j’ai aperçu une personne en difficulté qui se piquait sur un trottoir. La foule passait devant elle en l’ignorant ou en la jugeant. Je me suis demandé combien de fois j’avais fait la même chose. Si j’avais réagi autrement, la vie de ces personnes aurait-elle été différente. Les portraits de ces personnes croisées depuis l’enfance me sont revenus en mémoire et j’ai commencé à écrire.
Selon vous, quel est le cœur de votre roman ?
L’humain est au cœur du roman. La manière dont nos rencontres et les épreuves que nous traversons influencent nos choix et nos existences ?
Quelle est la teneur de votre héros (héroïne) et pourquoi ?
Les personnages sont les « ordinaires », les « invisibles » du quotidien qui cachent une existence extraordinaire ou traversent une épreuve avec courage et dignité. J’ai voulu les mettre en lumière et montrer que nous aurions tort de passer sans les voir.
Dans quelle mesure votre texte entre-t-il dans la ligne éditoriale engagée conduite par les Éditions Red’Active ?
Le texte nous questionne sur notre regard sur les autres, sur nous-mêmes et sur nos intuitions. Sommes-nous capables de percevoir les difficultés des êtres que nous côtoyons ? Pouvons-nous, devons-nous nous fier à notre instinct ? Combien de fois avons-nous passé notre chemin ? Masquons-nous si bien nos propres difficultés à notre entourage ? Comprenons-nous que chacun souffre, existe et vit, et que les gens ne s’éteignent pas lorsqu’ils sortent de notre périmètre ?
Quelle est l’émotion dominante que vous aimeriez laisser chez le lecteur ?
L’espoir.





